D.H Lawrence

Publié le par MAX HEADROOM

LADY CHATTERLEY

Pascale FERRAN, France, 2006, 2h38mn, avec Marina Hands, Jean-Louis Coulloc’h, Hippolyte Girardot, Hélène Fillières, Hélène Alexandridis, Bernard Verley... Scénario de Pascale Ferran et Roger Bohbot, d’après « L’Amant de lady Chatterley » de D.H Lawrence.




Des adaptations de classiques de la littérature, on en a vu. Des réussies et des ratées, des académiques et des audacieuses, des inspirées et des moins. Alors on pourrait se dire que ce n’est pas forcément la peine de consacrer plus de deux heures et demie à la version filmée du chef d’œuvre de D.H Lawrence. Et on aurait bien tort : tout ici semble neuf, les images comme les émotions, les sentiments comme les pulsions. Pascale Ferran n’a cédé à aucune facilité : pas de stars mais des interprètes habités, pas de belle image pour la belle image, pas de raccourcis simplificateurs dans le déroulement du récit ni dans l’évolution des personnages. Le temps dans cette histoire est essentiel, et la réalisatrice a su l’utiliser à merveille, nous faire ressentir les saisons qui passent, les paysages qui changent, les corps qui s’épanouissent ou qui s’altèrent... C’est vraiment très beau.
Wragby Hall, sur la terre des Chatterley, au cœur du pays minier d’Angleterre. Octobre 1921. Constance et Clifford, son mari, Lord and Lady Chatterley donc, sont installés ici depuis peu. Quatre années auparavant, tout juste après leur mariage, Clifford, alors lieutenant de l’armée britannique, revenait du front de Flandres en morceaux, le bas de son corps paralysé à jamais.
Épouse attentive, Constance est devenue malgré elle la nurse de cet homme usé qu’elle choie comme un enfant malade... Et les jours s’écoulent dans la grande maison, au rythme des tâches qui incombent à la jeune femme de bonne famille qu’elle se doit d’être : tenir la maison, recevoir les amis de son mari, donner les instructions aux domestiques.
Mais l’hiver qui arrive semble tout recouvrir, et l’âme de Constance avec… Enfermée dans sa propre vie et son sens du devoir, elle devient peu à peu indifférente au monde, se vide doucement de ses forces. Sa sœur Hilda accourt et exige de Clifford qu’il engage une garde-malade pour ses soins personnels afin d’alléger Constance du poids de cette charge. Mrs Bolton s’installe alors au château.
Les frémissements du printemps accompagnent Constance dans ses premières promenades dans la forêt du domaine. Mais la forêt, c’est le territoire de Parkin, le garde-chasse. Il coule seul au milieu de ses arbres une existence qui lui convient, loin du monde, loin de la mine, loin des paroles inutiles…
Fascinée par cette vie en solitaire, troublée profondément par ce corps massif, primitif, terrien, Constance va trouver refuge dans le havre paisible de Parkin, où rien ne semble venir perturber l’écoulement tranquille et parfumé des saisons.
Lady Chatterley est le récit de cette rencontre, d’un difficile apprivoisement, d’un lent éveil à la sensualité pour elle, d’un progressif retour à la vie « sociale » pour lui.
Pascale Ferran filme les corps comme la nature, sans artifice, sans chercher l’érotisme ni la beauté à tout prix, sa caméra est à la fois pudique et direct, presque naturaliste. La simplicité du regard donne aux scènes d’amour un caractère très sensuel et le spectateur n’est jamais voyeur, jamais gêné par les corps dénudés.
Car enfin, quelle femme, cette Lady Chatterley! Féministe avant l’heure qui découvre le plaisir avec un bonheur exultant, sans l’once d’une culpabilité, sans l’ombre d’un remord et, surtout, avec une infinie douceur. À travers ces sensations nouvelles, elle va s’affranchir de la pensée rigide dans laquelle son statut d’épouse docile l’avait jusque là cantonnée. La jouissance va aussi l’amener à penser par elle-même, à comprendre que le monde de son mari est loin d’être un paradis...

Publié dans cinetampes

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article